27 août 2007
Meringues d'hiver
C'est le désert de Gobi culinaire ces derniers temps.
Tout ce que j'entreprends, je le réussis. Ce que je cuis est mangeable, mes essais ne ratent pas lamentablement et malgré mes efforts les résultats sont concluants. Je mets pourtant un point d'honneur à interpréter les recettes et à améliorer à mon idée les concepts de base.
Ce week-end, une de mes amies m'a demandé de confectionner des cannelés pour un anniversaire. Tous ont cuit comme il faut (un chouilla mollassons, mais tout à fait présentables), et avec les six blancs d'œufs qui me restaient sur les bras, dans un esprit d'économie domestique, j'ai entrepris de les utiliser à des fins alimentaires.
On peut s'en servir pour filtrer le vin, mais je laisse ça aux spécialistes. C'est d'ailleurs indiqué sur les bouteilles de crus australiens, au grand étonnement de beaucoup qui ignorent cette technique. Mon Pépé poitevin ayant fabriqué une gentille piquette pendant sa vie de viticulteur, j'étais au courant, mais le procédé n'est pas un secret de famille. Et je me vois mal débuter une opération d'envergure dans ma petite maison de location, l'agence immobilière me guettant pour me coller des amendes si j'abîme quelque chose, tout ça pour écouler six blancs d'œufs.
Ayant passé ma matinée du samedi à confectionner les cannelés, ce qui inclut le nettoyage des moules achetés par ma copine à chaque tournée ("Regarde, m'a-t-elle annoncé, je t'en ai trouvé dix, tu m'en prépareras pour l'anniversaire, il y aura cent cinquante gamins et leurs parents"), j'ai fini par me retrouver face à mes blancs d'œufs, nous regardant bien entendu dans le blanc des yeux, moi m'interrogeant sur leur devenir, eux me sifflant d'une voix albuminée :
- Alors? t'as trouvé quelque chose? Tu sais que plus le temps passe, plus nous développons de germes? C'est dans les blancs que les savants font des cultures de bactéries car nous favorisons leur expansion plus que tout autre élément! Alors? Listéria? Salmonelle?
- Pas si vite, bon sang de bois, attendez encore un peu!
- Oui, oui, nous attendons, ne t'inquiète pas, mais nous sommes dehors, à température ambiante, on se sent pleins de vie!
- Euh, oui, voyons, ajoutè-je en feuilletant nerveusement Ginette Mathiot, ma copine en jaune qui fourmille de bonnes idées.
Je tombe sur une page me suggérant diverses mousses, toutes à manger dès la préparation sinon ça retombe. Ginette a écrit ses recettes à l'époque où d'accortes bonniches s'activaient en cuisine pendant que la patronne minaudait à table avec les invités, car je me vois bien faire une mousse au chocolat ou des œufs en neige au dernier moment.
Et je n'ai pas le temps! Les cannelés m'ont pris la matinée, le départ pour l'anniversaire approche, pas de voiture car Monsieur Pim est parti taquiner la truite pour la journée, il faut que j'appelle un taxi, bref ça devient compliqué.
Au fait, les meringues, ça ne se fait pas avec des blancs, ces trucs-là? Vérification chez mon Marmiton favori, où je trouve une recette dans la catégorie "facile" (pas d'improvisation joyeuse au dernier moment).
- Ça y est, accrochez-vous les blancs, action, on tourne!
Je laisse le robot s'activer en savourant le plaisir inégalable de ne rien faire et en louant Volta, Edison et Ampère d'avoir découvert les vertus de l'électricité et permis son utilisation dans le quotidien de la cuisinière de base. J'ai un jour voulu voir si on pouvait monter des blancs à la main, j'ai tenu vingt minutes et obtenu le résultat escompté ainsi qu'une luxation du coude, une élongation du biceps et la satisfaction d'avoir mené l'expérience à terme.
J'ai réalisé de jolis petits tas sans recourir à ma poche à douille, pas le temps de jouer à fabriquer d'émouvants tortillons, et hop, au four pour une heure. Sauf que le départ a eu lieu seulement trente minutes après, j'ai éteint le four et laissé les meringues se débrouiller, sans grand espoir de réussite.
Ô miracle! des tas de meringues impeccables m'attendaient gentiment au four le soir, cuites comme il faut, croquantes et sucrées, parfumées à la vanille ou à la fleur d'oranger. Impeccables pour les prochains pique-niques.
Ah oui, parce qu'on a beau être en hiver, il fait beau et... Non, il fait seulement beau, mais en Nouvelle-Zélande ça change tout!
Publicité
Commentaires
M
S
M
L
B